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Par G. militant à la REV depuis 2022 et prostitué depuis 2020

Ce 17 décembre a lieu la journée mondiale pour l’élimination des violences faites aux travailleuses du sexe. Comme chaque année des travailleuses et travailleurs du sexe du monde entier préparent une journée de mobilisation pour faire entendre leur voix et leur colère. Dans la France de Macron la chasse aux pauvres, aux migrants et aux prostituées bât son plein. L'accès à un logement, à la santé, à la justice, à un compte bancaire est toujours plus difficile. Aucun aspect fondamental de la vie humaine n’est épargné par la violence de l’Etat, en particulier envers les travailleuses et les travailleurs de l'industrie du sexe, dont je fais partie depuis maintenant 6 ans.

Je racole sur internet depuis mes 24 ans. J’ai commencé en 2020 entre le premier et le deuxième confinement, pour payer mes études. Je ne reçois pas chez moi, je vais chez le client, parce que j'ai peur d'être mis à la rue par mon bailleur. C’est déjà la galère de trouver un logement avec une fiche de paie, alors sans c’est impossible, il faut mentir pour ne pas finir à la rue. Si je me faisais agresser, voler, violer chez moi, la police ou les voisins devraient en informer mon bailleur qui risquerait 7 à 10 ans de prison s’il refusait de m'expulser. Quand je paie mon loyer avec l’argent de mon travail, là encore le bailleur est dans l'illégalité. Même m’héberger gratuitement est illégal, c’est considéré comme du proxénétisme. Sous couvert de me protéger on me refuse le droit au logement. Pour s'éviter les violences on peut décider de travailler à plusieurs dans un même appartement, j’ai déjà fait ça plusieurs fois avec des collègues. Certes on se protège, mais c’est surtout plus sympa de pouvoir papoter entre deux passes et regarder un film ensemble. Là encore c’est complètement illégal de travailler à plusieurs : aux yeux de la loi on est proxénètes les unes des autres. Sous couvert de nous protéger on nous isole. Toute forme de solidarité, de débrouille, de résistance est criminalisée dans la France des riches.

À Lyon, comme partout ailleurs en France, les préfets et les maires prennent des arrêtés anti-stationnement contre celles qui travaillent dans la rue en camionnette1. Les prostituées véhiculées sont accablées par les amendes et les frais de fourrière alors qu'elles essayent seulement de s’en sortir dans ce système capitaliste injuste. Les préfets et les maires ne veulent pas les protéger, ils veulent seulement les faire partir, effacer leur présence indésirable ; une présence susceptible de déprécier la valeur du foncier dans un quartier en pleine gentrification. Ainsi la facture est salée pour celles qui ont l’audace de travailler en camionnette, ou pire encore, en camionnette Crit’Air 4 ou 5. Pourtant elles y sont à l’abri du froid, du vent, de la pluie, de la fatigue musculosquelettique, du moins comparées à celles qui sont à pied.

Cette camionnette c’est un outil de travail, mais c’est aussi parfois une maison pour dormir et se reposer. Quand celle-ci est emmenée par la fourrière, il n’y a pas de relogement proposé. Une camionnette c'est aussi une protection contre les violences, contre les voleurs, les violeurs, les agresseurs, les chauffards en quête de piétonnes à écraser. Travailler en camionnette c’est également pouvoir stocker du matériel de protection, du lubrifiant, des préservatifs, une bombe lacrymogène, des produits d’hygiène, de l’électricité pour recharger le téléphone et appeler les secours, de quoi se restaurer ou se désaltérer. Celles qui travaillent à pied n’ont pas ce luxe, elles n'ont pas d'autre solution que de monter dans la voiture du client.

Les policiers ne protègent pas les travailleuses du sexe, le plus souvent ils refusent de prendre les plaintes et s’ils les prennent elles sont classées sans suite2. La police est très souvent dénoncée pour son racisme, sa misogynie, sa transphobie, son homophobie, sa putophobie. Les violences policières sont fréquentes, y compris les violences sexistes et sexuelles3. Les vrais coupables néanmoins, ce sont l'État. Ce sont eux qui nous ont mis dans cette situation de vulnérabilité, ce sont eux qui nous ont criminalisé. La répression n’est pas la solution, la police n’aura jamais pour rôle d’améliorer les conditions de travail des travailleuses et travailleurs. Pour éliminer les violences qui nous sont faites on a d’abord besoin de la décriminalisation totale du travail sexuel4.

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Sources :
(1) Rebellyon

https://rebellyon.info/Travailleuses-du-Sexe-de-Gerland-deux-24805
(2) Amnesty international

https://www.amnesty.fr/droits-sexuels/actualites/porter-plainte-pour-violences-sexuelles-en-france-
(3) Nous Toutes

https://www.noustoutes.org/wp-content/uploads/2025/11/PDF.enquete.MeTooPolice-1.pdf
(4) Medecins du monde

https://www.medecinsdumonde.org/publication/travail-du-sexe-rapport-devaluation-de-la-loi-de-2016/

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