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Par Ben Desurmont, militant de la REV. 


Ce 29 août marque la journée internationale contre les essais nucléaires. Alors que les conflits mondiaux s’intensifient, cette journée mise en place par l’ONU depuis 2009 apparaît plus nécessaire que jamais. C’est l’occasion d’évoquer les traités existant à travers le monde et ayant pour vocation de limiter ou d’interdire les essais et les armes nucléaires. C’est aussi l’occasion de revenir sur l’histoire tragique de ces essais, de l’Algérie à la Polynésie, et sur la gabegie financière de l’arsenal nucléaire tout en insistant sur la voix pacifique que pourrait porter la France.

La menace d’un embrasement nucléaire persiste

Lorsque l’on pense aux armes nucléaires, on pense avant tout aux funestes attaques d’Hiroshima et de Nagasaki qui ont eu lieu les 6 et 9 août 1945, occasionnant la mort de plus de 200 000 japonais⸱es et mettant fin à la Seconde Guerre Mondiale. Néanmoins, avant de lancer une telle attaque, il a fallu tester ces armes nucléaires. C’est ainsi que les Etats-Unis ont testé leurs armes nucléaires au Nouveau-Mexique en juillet 1945. Depuis, les essais nucléaires se sont multipliés un peu partout sur la planète. Les puissances nucléaires ont ainsi participé à plus de 2000 essais depuis 1945, si les Etats-Unis détiennent le triste record de 1125 essais nucléaires, la France a de son côté en a réalisé plus de 210.



Essai nucléaire français à Mururoa en Polynésie, en 1971. AFP PHOTO

Aujourd’hui, il ne reste que la Corée du Nord qui réalise des essais nucléaires, seul pays à avoir réalisé de telles exactions au XXIème siècle. Fort heureusement, l’ensemble des Etats de la planète ont pris acte des dangers, de la pollution et de la mort du vivant occasionné par ces essais. Aujourd’hui les essais ont uniquement lieu en laboratoire à des échelles réduites. Mais cette journée internationale contre les essais nucléaires est d’autant plus d’actualité que les dépenses dans le nucléaire sont en augmentation, comme le rappelle la coalition de plusieurs ONG nommée ICAN (Campagne Internationale contre les Armes Nucléaires) qui estime qu'au moins 9 puissances nucléaires ont renforcé leurs dépenses en armement nucléaire en 2023. Une préoccupation accrue compte tenu du fait que des pays belligérants comme la Russie et Israël sont dans cette liste, tout comme la France. 

De fait, le gouvernement du président Macron augmente chaque année les dépenses allouées à la dissuasion nucléaire. Ainsi entre 2019 et 2023, il y a eu plus d’un milliard de dépenses supplémentaires, passant ce budget à 5,6 Mds € en 2023. Comme le pointe  ICAN, cela “représente 10 654 € dépensé chaque minute pour la mise en œuvre, la modernisation et le renouvellement d’armes et de systèmes d’armes de destruction massive.” Et ce, alors même que les budgets alloués à l’éducation, la santé, la culture et la recherche sont sans cesse réduits à peau de chagrin.

Soure image: icanfrance.org


Les victimes des essais nucléaires

Comme évoqué en amont, le France a réalisé au cours de son histoire plus de 200 essais nucléaires. Ces derniers se sont déroulés dans le Sahara algérien ainsi qu’en Polynésie Française. Les conséquences environnementales et sanitaires ont été cachées durant des décennies. Ces essais, qui ont eu lieu entre 1960 et 1996, ont coûté la vie à des dizaines de milliers de personnes et les indemnisations de victimes sont encore rares. Si la loi Morin, relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, existe bel et bien, son accès aux populations algériennes est difficile, la barrière administrative et de la langue n’aidant pas. De plus, les déchets nucléaires enterrés dans le désert algérien ou reposant sur les fonds marins des atolls existent toujours et ne sont que rarement évoqués, hormis par des associations comme l’Observatoire des Armements.


Soure image: icanfrance.org

Les chiffres de potentielles victimes sont effarants, nous parlons de 150 000 personnels civil⸱es et militaires qui ont participé aux essais, de 210 000 polynésien⸱nes à la fin des essais, ainsi que de 40 000 algérien⸱nes. Pourtant seulement 1026 personnes ont été reconnues comme victimes et indemnisées.

L’héritage laissé à ces populations par ces armes de destruction massive n’est que leucémies, lymphomes, cancers de la thyroïde, du poumon, du sein, de l’estomac… Les nuages radioactifs ont contaminé sur des centaines de kilomètres d’après les documents déclassifiés. Bien au-delà des prévisions.  Les nouvelles générations subissent elles aussi des conséquences génétiques liées aux essais nucléaires. Un héritage toxique, nié par la France, qui agit ici en éternel État colonial en Algérie et en Polynésie, comme l’évoque le Docteur Christian Sueur. Le média d’investigation Disclose a réalisé une enquête intitulée “Mururoa Files” mettant en avant les différents clusters de cancers et le fait que des accidents sanitaires auraient pu être évités.

Enfin, bien que ce soit peu évoqué, ce sont probablement des millions d’animaux marins qui ont subi les conséquences des essais nucléaires en Polynésie, tout comme les autres victimes animales qui résident dans les espaces désertiques du Sahara. Une destruction grave des écosystèmes, du vivant, et une atteinte envers des individus sentients.


Le TNP, le TICE, le TIAN, de quoi parle-t-on ? 

De nombreux sigles qui désignent différents traités ayant pour but ultime un monde sans menace nucléaire, ainsi:

  • le TNP (Traité de non prolifération des armes nucléaires) existe depuis 1968 et signé par 191 Etats

  • le TICE (Traité d’interdiction complète des essais nucléaires) existe depuis 1996 et signé par 186 Etats 

  • le TIAN (Traité sur l’interdiction des armes nucléaires) est ouvert à signatures depuis 2017 signé par 93  Etats


Il est à noter que bien que de nombreux pays aient signé ces traités, certains ne l’ont pour autant toujours pas ratifié. Ainsi une seule signature ne représente qu’un acte de bonne foi sans que le traité ne soit lié juridiquement à la législation du pays. Néanmoins, la majorité des Etats ayant signé ces traités les ont également ratifiés.


Si chacun de ces traités ont leurs spécificités, ils participent tous à  œuvrer pour un monde sans armes nucléaires, qui risquent de mettre fin au vivant sous toutes ses formes.

Le plus récent, le TIAN, qui vise purement et simplement l’interdiction des armes nucléaires, rappelle entre autre que “les effets catastrophiques des armes nucléaires ne peuvent être contrés de manière satisfaisante, transcendent les frontières nationales, ont des répercussions profondes sur la survie de l’humanité, l’environnement, le développement socioéconomique, l’économie mondiale, la sécurité alimentaire et la santé des générations actuelles et futures et touchent de manière disproportionnée les femmes et les filles, notamment en raison des effets des rayonnements ionisants”. Chaque ligne de ce traité majeur rappelle l’urgence et la nécessité d’interdire les armes nucléaires.

Alors qu’un conflit armé a lieu en Europe, que le désarmement nucléaire s’enlise avec une croissance des budgets militaires à travers la planète, il est plus qu’urgent que d’aucuns se lèvent pour porter, comme la REV, un projet politique pacifique. La France doit œuvrer dans ce sens, alors qu’elle possède en 2024 près de 300 ogives nucléaires, il convient de réduire grandement ce nombre pour à terme ne plus avoir une seule ogive nucléaire sur son sol et porter une voix pacifique et exemplaire à l’échelle mondiale. La France doit rejoindre le TIAN, et peut aussi d’ores et déjà s’engager comme un Etat observateur lors de la troisième réunion de ce traité en mars 2025 au siège des Nations unies.

Sources:


Disclose. Enquête “Muroroa Files” <https://moruroa-files.org/fr/investigation/moruroa-files>

FranceTNTP “Le Traité d’Interdiction Complète des Essais Nucléaire (TICE)” <https://www.francetnp.gouv.fr/le-traite-d-interdiction-complete-des-essais>


Icanfrance.org “Communiqué: Dépenses mondiales pour le nucléaire en 2023: l’instabilité mondiale accélère les dépenses nucléaire”     <https://icanfrance.org/communique-dépenses-mondiales-pour-les-armes-nucléaires-2023/>

Kaizen Magazine “Polynésie française: l’ombre des essais nucléaires <https://www.kaizen-magazine.com/2021/08/26/polynesie-francaise-lombre-des-essais-nucleaires/>

Obsarm.info “Conséquence génétique des essais nucléaires: l’étude accablante du Dr. Christian Sueur en Polynésie” <https://www.obsarm.info/spip.php?article300>

Obsarm.info “Emmanuel Macron en Algérie: vérité et justice pour les victimes des essais nucléaires” <https://www.obsarm.info/spip.php?article396>

rfi.fr “Pourquoi la fin des essais nucléaires n’empêche pas la prolifération des armes atomiques” <https://www.rfi.fr/fr/monde/20230829-pourquoi-la-fin-des-essais-nucl%C3%A9aires-n-emp%C3%AAche-pas-la-prolif%C3%A9ration-des-armes-atomiques>

rfi.fr “Nouvelles révélations sur les conséquences sanitaires des essais nucléaires en Polynésie française”

<https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20210309-nouvelles-r%C3%A9v%C3%A9lations-sur-les-cons%C3%A9quences-sanitaires-des-essais-nucl%C3%A9aires-en-polyn%C3%A9sie-fran%C3%A7aise>

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