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Par Audrey, employée dans une médiathèque et coréférente REV Auvergne-Rhône-Alpes 

Il est particulièrement étonnant de constater la place de la culture dans les débats politiques. Lors des dernières élections présidentielles, l'absence du terme “culture” était telle que nous pensions le mot sur liste noire. Il est vrai que le capitalisme, le libéralisme et la culture n'ont jamais très bien cohabité. Lorsque le mot est enfin évoqué, il est alors associé au spectacle vivant : concerts, festivals, théâtre, spectacles…

Ce premier pas nécessaire est pourtant loin d'être suffisant. S'il faut soutenir ce secteur de création de manière bien plus importante qu'à l'heure actuelle, oublier la diffusion de cette même création sur l'ensemble du territoire est une grave erreur du gouvernement. En effet, les lieux de spectacles sont majoritairement situés dans les grandes agglomérations et leur accès est coûteux.

La médiathèque, cet espace public offrant toute la diversité des œuvres disponibles, pourrait bien être le l’outil idéal pour assurer un accès de toutes et tous à la culture. Ceci à condition bien sûr que les élus du territoire soient soutenus par l’État sur les budgets de fonctionnement. 

Des prix qui grimpent

La culture souffre d'une image élitiste réservée aux seuls citadins pouvant s’offrir ce luxe généralement hors de prix. Comment financer des concerts à plus de 70 euros la place, des entrées au cinéma à plus de 15 euros sans parler de l'opéra ou du théâtre qui atteignent également des sommets ? Le pouvoir d'achat diminue et lorsqu'il faut choisir entre manger et se cultiver, le choix n'en est plus un. 

Médiathèque : un trésor trop peu exploité

Dans un secteur en souffrance et trop souvent ignoré, j’aimerais mettre un peu de lumière sur un réseau formidable de passeurs de culture qui existe déjà : les médiathèques. Elles sont au nombre de 16000 en France pour 34 000 communes environ. Une commune sur deux disposerait d'une médiathèque. Et pourtant, la politique libérale est en train de casser ce trésor à portée de toute la population.

Si l'on regarde d'un peu plus près et en arrondissant un peu les chiffres, 80% des bibliothèques des communes de moins de 5000 habitants sont uniquement gérées par des bénévoles, dans de minuscules locaux souvent multifonctionnels, octroyés par les mairies. Ces petites structures ne sont portées que par un réseau de bonnes volontés souvent mono-générationnelles et non formées. Les budgets d’acquisition, lorsqu’ils existent, sont tirés vers les bas et réduits d’année en année. 

Pourtant, la littérature, la musique, le cinéma, les jeux vidéo ne sont pas des objets figés. Il est important de favoriser la curiosité, la découverte, le partage créatif et ce bouillonnement culturel permettant de libérer les esprits et forger les consciences. Si certains territoires ont à cœur de développer ces réseaux, nous constatons de lourdes disparités en fonction des politiques locales. Mais quelles que soient les orientations programmatiques des élu·e·s, toustes manquent cruellement de soutien de l’État sur la ligne budgétaire de fonctionnement de ces lieux. 

Les médiathèques : un outil contre l’injustice culturelle

Face aux tarifs exorbitants des supports audiovisuels, des places de cinéma ou encore des supports numériques, les médiathèques représentent une alternative sous-estimée, qui lutte contre l’injustice sociale et l’isolement : 

  • Elles offrent un accès direct à la littérature, à la musique, au cinéma, aux outils de recherche, mais également aux jeux vidéo, aux jeux de société et à une multitude d’autres ressources.

  • L’accès y est souvent gratuit (et la REV demande une gratuité totale de l'accès à ces espaces, et défend une politique du temps libéré, du temps pour soi). Les médiathèques permettent ainsi aux personnes les plus démunies et fragiles d'accéder à de nombreuses ressources aussi bien pour les études que pour la recherche d'emploi ou encore pour l'épanouissement personnel.  

  • Présentes même dans des petites communes, elles luttent contre les zones blanches culturelles.

  • Elles proposent des supports et des aides contre l’illettrisme.

  • Lieux publics et ouverts sans discrimination, elles sont des lieux refuge pour les plus démunis, permettant d'être au chaud et en sécurité en hiver.

  • Elles sont des appuis forts pour les écoles, centres de loisirs mais également les Ehpads et autres structures d'accueil.

  • Elles constituent un réseau de soutien et d'expression pour les artistes ne pouvant accéder à de grandes scènes trop coûteuses.

  • Ce sont des professionnels, lorsqu'il y en a, à l'écoute, de bons conseils et passeurs de culture. 

  • Elles offrent également, dans la mesure du possible, un accès à un réseau informatique pour les démarches administratives des personnes n'ayant pas les moyens d'en bénéficier chez elles. 

Les médiathèques préservent la planète et le vivant

À l'heure où nous devons économiser nos ressources, il semble essentiel d'être dans une démarche de décroissance. Mais la décroissance n'est pas synonyme de retour en arrière ni d'obscurantisme. Avec les médiathèques, nous avons un outil fonctionnel de mutualisation permettant une diffusion optimisée des œuvres :

  • L’impression puise des ressources physiques. Par leur rôle de centralisateur, les médiathèques (mais également artothèques, ludothèques, vidéothèques, discothèques etc...) luttent contre la démultiplication des supports en mutualisant les documents. Une seule impression profite à des dizaines de personnes. 

  • La numérisation a un coût écologique dévastateur. Un seul épisode d'une série télévisée regardée en streaming coûte, en termes de ressources, quasiment autant que ce même épisode gravé sur un support DVD. Mais un DVD se partage, se prête : s’il est utilisé par 10 personnes, l’impact écologique est divisé par 10.

En luttant contre l'obsolescence programmée de certains supports et en favorisant la mutualisation de ces supports par le biais des médiathèques, nous œuvrons en faveur du vivant.

Pour la sauvegarde des médiathèques au service d’une popularisation de la culture

Il est temps d'arrêter de mépriser les personnes qui vivent en dehors de la capitale et de leur offrir un accès à la culture digne de ce nom. La REV soutient donc ces passeurs de culture que sont les médiathèques sur l'ensemble du territoire et demande à l'État un regard nouveau sur ces structures, trop souvent en manque de personnel et de budget. 

Les mairies doivent être soutenues sur les lignes budgétaires de fonctionnement, le personnel formé et qualifié devrait être majoritaire même si le maillage de bénévoles reste complémentaire et nécessaire.

Les budgets d'acquisition des documents et d'animations doivent être revus à la hausse par rapport au nombre d'habitants de chaque commune. Le montant de ces budgets doit être soumis à  un seuil minimum en deçà duquel les communes ne peuvent pas descendre quel que soit le projet politique de l’équipe d’élus. Il serait également intéressant de réhausser le seuil minimum pour les petites communes afin de permettre une diversité minimale dans le choix des œuvres à découvrir pour les usagers.

Enfin il est important de trouver et d'entretenir des locaux accessibles à toustes. Cela serait possible, si l’État cessait de gaspiller l’argent public réservé à la culture dans des concepts grandiloquents mais vides de sens. Créer de belles structures : oui, les délaisser après la construction à cause des coûts de fonctionnement : non. 

La culture est un bien commun que nous devons préserver, un moyen de lutter contre les injustices sociales, écologiques, l’obscurantisme et la peur de l’autre. 


Par Audrey, employée dans une médiathèque et coréférente REV Auvergne-Rhône-Alpes



Sources : culture.gouv.fr

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